La francisation au Québec est-elle un échec?



Apprendre le français au Québec

Dès le départ, on a cette question de réussite. Selon le rapport du Vérificateur Général du Québec (VGQ) : «La vaste majorité des participants aux cours de français du ministère (90%) n’ont pas atteint le seuil d’autonomie langagière». Il est important de noter que le VGQ utilise un seuil qui correspond à un cours de francisation de niveau 8 sur l’Échelle québécoise des niveaux de compétence en français. C’est une maîtrise qu’on pourrait comparer à celle d’un élève prêt à entreprendre des études postsecondaires. Dans la vraie vie, afin d’obtenir la citoyenneté on demande de réussir un niveau 4. C’est un niveau suffisant pour se débrouiller dans la société québécoise et devenir autonome dans son apprentissage du français. D’après le rapport du VGQ, la grande majorité des immigrants réussissent un cours de ce niveau.

La francisation et l’argent

Les élèves admissibles au programme du MIDI reçoivent moins de 630$ par mois. Ils sont en classe de 8:15 à 15:50, cinq jours par semaine. C’est 8 000$ par année, soit beaucoup moins que le seuil de pauvreté au Québec (18 000$). Ils ont tous très hâte d’être sur le marché du travail. Je vais en surprendre plusieurs, mais le niveau 4 permet de vous dire Bonjour/Hi :-). En fait, ils peuvent faire beaucoup plus que ça. Compléter le niveau du SAL peut prendre plus d’un an. Vous pouvez imaginer à quel point cela peut être frustrant pour les diplômés universitaires qui vont devoir, après le programme de francisation, retourner à l’université. Mais la question de la reconnaissance des diplômes est un autre débat.

La francisation et l’andropédagogie

Le programme de francisation représente plus de 1000 heures de cours. C’est un engagement à temps plein qui déjà pour l’élève normal représente une charge très lourde. On ne peut pas espérer la même vitesse de progression d’un élève scolarisé d’un élève analphabète ou d’un élève à la retraite. L’élève adulte moyen en francisation a des besoins très différents de celui qui a passé toute sa vie dans le réseau scolaire. La relation maître-élève est fondée sur un rapport de confiance à construire. L’apprenant adulte a une expérience de vie, des habitudes, des croyances et des connaissances qui doivent être au centre de son apprentissage. Bref, ça prend du temps.
Au final, la francisation au Québec est loin d’être un échec. Bien sûr, il y a des progrès à faire. Cependant, ce n’est pas par des politiques migratoires qu’on ajuste comme un tableau Excel qu’on améliore le système. C’est en soutenant le travail acharné des enseignants, des aides-pédagogique, des commissions scolaires et des organismes communautaires. Il ne faut pas oublier que la plupart de nos immigrants viennent du programme de regroupement familial et de celui des réfugiés. Mon père a quitté une vie difficile au Maroc dans l’espoir d’avoir une vie meilleure au Québec. Il a éventuellement fait venir son père et sa mère. Ils n’ont jamais appris plus que quelques mots de français (à l’époque la francisation en était à ses débuts), mais c’est ce qui a fait qu’il se sentait CHEZ LUI au Québec. Il a même voté OUI en 1995… et surtout il a eu un fils qui non seulement parle français, mais enseigne cette langue et sa littérature.

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